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Le vampirisme dans le Groupement Bafou

Détails: Publié le lundi 24 septembre 2012 18:49

(é-leu, a ntieû fv’où )

E –leu est pratiqué par le ‘’ndeû’’ ou vampire.

Selon la définition ancestrale Bafou, le vampirisme serait une pratique plus ou moins métaphysique, qu’ont certaines personnes à identité isolée,

de faire leur mue en abandonnant leur état somatique pour sortir nuitamment de leur réserve sous forme d’esprits à la quête du sang chaud des vivants. Une pratique des êtres invisibles qui, dans la majeure partie des cas entraine une lacune anatomique et même le décès de la victime. Il existe le « ndeû » pratiquant qui, tout le temps, a pour vocation de sucer systématiquement du sang humain par des méthodes peu orthodoxes. Puis en face de lui, il ya le « ndeû » qui utilise son savoir faire naturel pour rendre heureux, pour soigner, bref, pour donner un sens à la vie.

A une époque jadis, ou la médecine moderne n’avait pas atteint son apogée, qui est susceptible de faire des recherches sur le genre de mort, la tradition attribuait après la pseudo-autopsie, la mort à l’œuvre qu’aurait effectuée le vampire. Dans le meilleur des cas, les enfants qui mourraient à un certain âge (5 à 9 ans), étaient « ceux du ciel » ou bien « les enfants à deux mondes » qui, dit –on, partaient dans un autre univers et revenaient sur la planète terre comme bon leur semblait.

Chez les Bafou, un dicton se dit au quotidien, accusant le Dieu Tout Puissant d’être vampire : « ndeûmè-ndeû ». Autant qu’on se mette en évidence qu’ici cette expression ne saurait garder la même connotation. Ici Dieu est ‘’ndeû’’ singulier et atypique : c’est un Dieu miraculeux, mystérieux, miséricordieux et aimable. Il en est de même lorsqu’on est très bon médecin, bon chirurgien. L’homme Bafou dira que ces praticiens sont des vampires, d’autant plus qu’ils ont utilisé cette expertise pour exceller dans les traitements ou les opérations des maux internes dont souffraient certains patients.

Et s’il est vrai que Dieu est le début et la fin de toute chose, créateur de l’univers dans le quel logent bons et méchants, bien et mal, vampires ou sorciers bref, ce qui forment une certaine bipolarité par rapport aux êtres : cela n’est que le reflet de sa volonté qui a été faite, et il laisse faire.

D’autre part, la peinture caricaturale du vampire fait d’emblée croire à une mythologie, mettant en scène les animaux, les personnages imaginaires ou amplifiés par la tradition, les forces naturelles et extranaturelles. Ajouter à cela, les hiboux, les femmes barbues, les chats, les moustiques dont les caractéristiques s’apparentent à celles du vampire de format traditionnel. Cette Kyrielle d’êtres représente à coup sûr les clichés des totems inhérents à un ou plusieurs groupes isolés de personnes évoluant dans l’invisible.

Un problème se pose ici avec acuité et devient paranormal qui, parfois renvoie à faire recours aux parapsychologues :

Certains phénomènes qui passent à travers les murs, portes et fenêtres bâclées, se réalisent dans les rêves. Les éléments qui vont dans le même rêve ont parfois le même type de communication de conscience, par plusieurs personnes qui ont vu le même vampire faire son opération sur la victime.

Dans ce groupement, le hibou est et demeure le prédateur le plus craint comme totem affecté à un vampire. Il est très redoutable. Autrefois, il hululait en se déposant nuitamment sur les toitures du village. Les populations l’ont toujours considéré comme vampire et que son manifeste laissait présager un esprit maléfique en voie de pénétrer dans la concession à travers les murs. Cet esprit était supposé s’incarner dans la victime sous forme d’air que ce dernier inspire.

Une fois que la victime expire, il en ressort le travail interne terminé. Selon les pratiques traditionnelles d’autopsie, certaines parties des organes internes du corps, sont attribuées au vampirisme. Il s’agit des parties non osseuses qui leur procurent assez de sang chaud, facile à digérer.

Dès lors, ce travail interne du « ndeu » consiste à détruire un organe vital pour pouvoir sucer du sang. Ce n’est que le matin de bonne heure que la victime commencera à ressentir des malaises internes, preuve mitigée qu’il s’est passé quelque chose d’anormal. Parfois une intervention chirurgicale démontre des lésions aux poumons, au foie, ou des hémorragies internes.

On oublie quelques fois que ces lésions vues au niveau des poumons peuvent provenir de la tuberculose, par exemple :

La genèse du vampirisme

‘’É-leu’’ ou vampirisme est un caractère héréditaire lié aux chromosomes. Il se transmet comme une tare, de la première génération jusqu’aux arrière petits-fils. Cette définition est autant valable sur l’homme que sur les moustiques qui ont les caractères communs. Puisque quelque part, le moustique évolue comme un « ndeu » qui opère aussi nuitamment et suce le sang du vivant, transmet la maladie qui peut produire une mort certaine.

Mutations dans les 2 cas :

- La femelle a une tare liée aux chromosomes à prévalence pure de 100% (xx). C’est elle le vampire qui suce du sang.

- Le mâle a une tare liée aux chromosomes à prévalence récessive de 50% (xy). C’est le vampire sain.

Chez l’homme : c’est la femme qui fait le vampirisme. L’homme ne fait pas le vampirisme.

Chez le moustique : l’anophèle femelle est porteur de la tare dominante, c’est elle qui suce le sang.

L’anophèle mâle est porteur sain, ne suce pas le sang. Il est très inoffensif. Sa tare est récessive.

Toutes leurs pratiques contribuent à la destruction de l’être humain en nocturne, lorsqu’il se trouve dans un état inconscient de somnolence ou de sommeil profond.

Et puisque certaines langues disent que le vampirisme est par essence un don de Dieu qui est transmis à une bonne frange de sa créature en vue de voir à l’au-delà pour pouvoir soigner les parties internes de l’homme. Il a cru ainsi créer l’homme et ses médecins chirurgiens en même temps. Cette mission n’a malheureusement pas été accomplie par certaines au sein desquelles les démons du mal ont trouvé refuge. Le moustique aurait certainement détourné sa mission, qui consiste à administrer des injections préventives efficaces, à dessein pour éreinter les maladies, quelque soit leur nature. Mais cependant dans la zone littorale du Cameroun, précisément dans le NKAM, les moustiques sont classés au rang des vampires, autrement dit, ils sont recommandés spécialement lorsqu’ils introduisent leurs piqûres sur un être bien précis, puis c’est la mort immédiate qui survient sans autre forme de procès. Une simple injection intramusculaire faite sur un patient à l’endroit d’un nerf sciatique, laisse dans le choc et entraine parfois le décès de ce dernier. La médecine traditionnelle trouve une explication à cela : on aurait fléché son totem en brousse ou en forêt.

Le cas des femmes barbues, reste encore plus perplexe car ce caractère qu’elles portent est lié à un disfonctionnement des hormones hypophysaires. Mais elles sont considérées dans le landernau populaire Bafou, comme étant des vampires.

Beaucoup de personnes meurent lorsqu’on réussit à tuer et à incinérer leurs hiboux hululant, perchés dans les feuillages.

Eléments de motivation liés à la pratique du « leu »

Ils s’exclament souvent par l’expression suivante : « mieux de lui ! » en langue c’est « ôh-yi-zi !» Eûm ! Ceci annonce des pensées de mauvais augures propres à un certain environnement spécifique au climat délétère et acariâtre.

Au-delà d’une scène de moquerie, ce langage se prête à une sorte de calibrage de haine gratuite devant laquelle, l’amour du prochain et les félicitations sur des œuvres réussies, perdent leurs bons sens et cèdent la place à une éventuelle cruauté in extenso.

Ce bourreau ne réclame rien à personne et personne ne lui doit rien, même pas une seule aiguille. Mais son portrait robot présente des traits à n’en point douter de ce qui caractérise son fond et sa forme. L’amertume fade, et puis rien ne l’émeut, même pas un macchabée posé en bordure de route. Un regard toutefois fugitif qui ne cesse de donner de lui une image crapuleuse de paysan coupable de quelque chose.

Le vampire soliloque toujours et partout où il se trouve. Il développe dans sa tête, beaucoup d’idées ayant trait à la concurrence décousue, à la jalousie ou au crime sombre. Selon lui, il faut à tout prix détruire celui qui aspire à un avenir radieux dans un groupement comme Bafou :

Les expressions ci-dessous énumérées donnent le profil de ceux ou de celles dont la haine reste l’instrument par excellence de lutte contre la nature humaine :

· Il se suffit parce que tous ses enfants ont réussi dans la vie.

· Il veut nous montrer qu’il s’est acheté un beau véhicule ?

· Il a construit un bel immeuble, pourquoi pas moi aussi ?

· Ses enfants se trouvent en Europe et s’occupent de lui. Quoi de plus normal qu’un vampire tue un enfant qui ne lui appartient pas, juste parce que les moyens ont permis à ce dernier de rendre ses parents heureux

Des approches de répression

Scandalisées par les taux sans cesse croissants de la mortalité infantile due aux faits des vampires, les populations Bafou, s’organisaient autrefois par quartiers, mettant en place, des mécanismes d’alerte susceptibles d’extirper ces esprits invisibles, les mettre hors d’état de nuire. Cela consistait en : soupçonner la présence d’un esprit dans le quartier et tout commence par le tapage sur les clôtures en bambous, le battement sur des balafons, production des vacarmes avec vieilles casseroles accompagnés des cris et des youyous en direction du quartier voisin qui, à son tour reçoit le message et utilise ses instruments pour relayer, tel une chaine ondulatoire sonore.

Ceci étant une forme d’accompagnement des vampires du village. Les relais en vacarme empêchaient ces figures sombres de faire une moindre escale durant leur parcours jusqu’au-delà des frontières du village.