Vous avez dit «l’argent gouverne le monde». Et nos familles?
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- Publié le lundi 18 août 2014 16:16
«Me’hhotchœh-è nang-hâ’ ngongnkap’» (Proverbe Yemba, L’argent est le maître du monde, Proverbe français.)
Devenu incontournable, l’argent est une source de discordes dans la société, entre les Etats, au sein des communautés et des familles. Il est aussi devenu indissociable avec le pouvoir, l’envie et la convoitise. Combien de fois n’avons-nous pas assisté à l’invalidation d’une proposition ou d’une opinion en faveur de celle d’une personne plus nantie? Ce qui est sûr, c’est qu’il arrive des moments dans la vie où des difficultés se dressent devant nous comme des montagnes insurmontables au point qu’on se demande si l’argent n’est pas la panacée à nos problèmes. Dans un contexte marqué par la solidarité, le dernier rempart reste alors le membre de famille ou le proche disposant, à nos yeux, des moyens et des ressources pour venir à notre secours lorsque nous sommes en difficulté. Or, on est déçu lorsque ce dernier exprime son incapacité à nous aider.
Si la pauvreté ne rend pas la vie facile, il faut dire que le riche n’a pas non plus la vie facile, surtout là où beaucoup de personnes comptent sur lui. On se retrouve parfois dans une famille avec deux personnes sur qui tout le monde compte. Pour les problèmes de pension, de maladie, de scolarité des enfants, des deuils, tous les yeux sont tournés vers ces dernières. Jugeant de l’extérieur qu’elles détiennent la baguette magique pour résoudre tous les problèmes, on leur fait tous les procès d’intention.
De plus en plus, de personnes nanties usent de leur position sociale, politique et économique pour transgresser les normes et faire la pluie et le beau temps au détriment des frères et sœurs démunis. Le capitalisme, avec pour noyau l’argent "roi" et le pouvoir, a au fil des ans a entraîné dans nos communautés un matérialisme criard avec des effets pervers sur les rapports interpersonnels. Au-delà de l’héritage et de la succession autour desquels se cristallisent les conflits familiaux, les problèmes de classe constituent une source non négligeable des discordes allant de la simple incompatibilité d’humeur, du mépris et de la jalousie jusqu’aux coups bas pas les moins périlleux.
La connivence de certains parents et l’hypocrisie familiale
Dans certaines familles, on observe une alliance notoire des parents avec les enfants aisés, au détriment des plus pauvres. Et, en le faisant, ils prennent parti pour les uns et livrent les autres à la merci des premiers. Lors des réunions familiales, le silence va jusqu’à l’omerta surtout quand on soulève les problèmes fondamentaux qui divisent la famille. Les uns, pour protéger leurs intérêts, préfèrent se réserver de porter un jugement quelconque. Et s’ils sont poussés à le faire, ils se refugient derrière les conseils abstraits et les tournures de la langue qui laissent en fin de compte plus de points d’interrogation que de pistes de solution.
On assiste à de scènes saugrenues où le frère A émet une proposition raisonnable, laquelle est rejetée à l’unisson tandis que le frère B qui est riche revient quelques heures plus tard avec la même proposition et recueille des ovations. Un projet d’intérêt général est vite étouffé parce que les origines de l’initiateur sont jugées trop modestes. On entend les uns et les autres interroger, non sans mépris: «C’est l’enfant de qui?» Tout est fait pour caresser celui/celle qui a de l’argent dans le sens du poil et pour discrétiser à priori toute initiative ou idée émanant du pauvre. En cas de transgression des normes, on n’ose pas rappeler à l’ordre le frère/la sœur qui «met les gens en haut», selon ce proverbe qui dit qu’«on ne manque jamais le respect à l’égard de quelqu’un qui a de l’argent dans sa poche» (A lâhho’ pângneung’, me’ wouak-a hî. L’Universalité …, p. 39).
Lorsqu’on s’inscrit en faux contre une telle posture se trouvant aux antipodes de nos valeurs familiales et de l’égalité entre les enfants, c’est avec le proverbe suivant qu’on vous rappelle à l’ordre : «La main qui donne est toujours au dessus de celle qui reçoit». Et pourtant, on ne saurait mettre l’argent au dessus de la valeur intrinsèque de l’être humain au point de traiter et d’aimer ses propres enfants au prorata de leurs portemonnaies. Un traitement discriminatoire qui dans certaines familles s’applique même sur les petits-enfants au point que certains grands-parents expriment sans vergogne une préférence pour leurs petits-enfants dont les parents sont financièrement assis.
Quand l’argent piétine le droit d’aînesse et définit la noblesse
Dans certains villages, il est devenu difficile, comme le soulignait déjà un article de Bafou.org, de concilier l’élite traditionnelle et l’élite politico-économique. Certaines élites voulant se réserver une place éternelle au piédestal des honneurs et de la noblesse, piétinent parfois l’ancien ordre établi.
Le droit d’aînesse constitue l’une des pierres angulaires de nos sociétés. De nos jours, il ne trouve toujours pas application lorsque les intérêts sont en jeu. Il n’est plus rare de voir certains aînés se prosterner devant leurs jeunes frères/sœurs parce que ces derniers sont socialement et financièrement plus assis qu’eux. Pendant les réunions familiales, on assiste à des scènes scandaleuses où un nouveau riche fait montre d’une attitude de condescendance au point d’administrer une gifle au frère aîné. Il cherche contre toute logique à imposer ses opinions et son agenda et ne supporte pas ipso facto une critique quelconque. Adulé tel un «bailleur de fonds», il intimide, méprise les aînés et impose des barèmes à géométrie variable.
La réussite d’un membre de la famille fait et doit faire la fierté des autres, toutefois elle ne doit pas pour autant contribuer à reléguer au second rang le respect mutuel sans lequel la famille perdrait sa valeur. Dans nos familles basées sur le principe de la solidarité et la règle classique du "un pour tous" et du "tous pour un", il devient de nos jours difficile, face au coût élevé de vie, de répondre aux attentes de tout le monde. Il reste nécessaire de trouver un équilibre entre les demandes des autres et ses propres besoins. Malgré la richesse, «E ngueûmboung’, a lâmbângang-nkap’ hhœô» (L’Universalité …, p. 38).
Source des proverbes: FOGUI Jean-Pierre, L’Universalité de la Culture. La preuve par les proverbes, L’Harmattan, Paris 2009.
© Correspondance: Florence TSAGUÉ
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