«Lorsque Mami et Papi partent se chercher à Mbeng»

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Publié le lundi 5 mars 2012 17:16

L’Émigration des personnes âgées : un sujet tabou ?

Même si les migrations de retraite qui ne sont pas des migrations de retour restent très nationales dans presque tous les pays du monde, on note cependant un mouvement de personnes d’un certain âge [1] en direction des pays industrialisés où vivent dans la plupart des cas un membre de leur famille.

Contrairement aux «migrations du soleil» s’appliquant aux retraités des pays industrialisés qui partent non seulement à la recherche des régions ensoleillées, mais aussi à la quête des sociétés traditionnelles aux conditions propices à l’accueil des vieux, selon Yves MONTENAY (cité dans : Café Géographiques), on pourra parler ici des “migrations de neige”. Dans ce cas-ci, les migrants ne sont pas à la recherche d’une région aux conditions climatiques froides. Ils sont plutôt motivés par la recherche d’une sécurité sociale et médicale ou tout simplement par le souci d’un rapprochement familial dans un contexte transnational.

En ce qui concerne les personnes âgées migrant de l’Afrique vers l’Europe et l’Amérique du Nord, on est en droit de s’interroger sur leurs motivations, leurs conditions de voyage ainsi que leur intégration dans les pays d’accueil. Jusqu’à une date récente, les conditions de voyage constituaient un énorme défi pour les femmes, les enfants et les personnes âgées en sorte qu’on y notait un surplus d’hommes à la fleur de l’âge. De nos jours, la migration internationale est caractérisée par une montée du nombre des femmes pour de diverses raisons [2]. Le rapport du Fond des Nations Unies pour la Population (FNUAP) de 2006 estimait à environ 95 millions, le nombre de femmes migrantes sur un total de 200 millions de migrants en 2009 (Human Development Report 2009, p. 9).

Si les programmes et mesures d’insertion sociale des personnes âgées issues de la migration se sont avérés nécessaires dans les pays d’accueil, force est cependant de constater que les conditions des personnes d’un certain âge s’installant nouvellement dans un pays ainsi que leur processus migratoire passent presque inaperçus dans les politiques d’intégration. Ceux de la génération des travailleurs émigrés en Allemagne appelés communément “Gastarbeiter” qui aujourd’hui sont pris en charge dans les foyers d’accueil pour personnes âgées ou par leur famille, présentent bien entendu une autre biographie migratoire que ceux qui quittent leur pays pour joindre leur famille ou tout simplement pour tenter l’aventure à l’étranger, n’étant plus jeunes.

En ce qui concerne le Cameroun, la migration internationale des personnes d’un certain âge, bien qu’elle soit encore mimine en chiffre, s’avère être très féminine. Ce sont généralement les “Mamis” qui viennent par exemple en Occident pour porter secours à leur fille en cas de maternité. Face aux conditions de vie difficiles et à la difficulté à trouver une baby sitter ou de payer une main d’œuvre pour s’occuper de l’enfant, l’option de faire venir sa propre mère reste la moins chère et présente d’ailleurs de nombreux avantages au plan de la transmission des valeurs culturelles. Le retour de la grand-mère disparaissant progressivement des projets de la famille, c’est ainsi qu’elle finit par faire partir des meubles de la maison et s’habitue à sa nouvelle vie. En constituant une main d’œuvre indispensable pour sa fille, son chemin de retour devient ipso facto difficile.

Pour ce qui est des personnes d’un certain âge dont le projet migratoire est de prime abord une aventure, il y a jusqu’ici peu de recherches sur leurs motivations. Entre autres, l’on penserait aux migrations de retraite, à l’accès aux soins médicaux appropriés, aux conflits familiaux, à une vie matrimoniale insatisfaisante, au goût de l’aventure ou au désir de retrouver enfants et petits enfants installés à l’étranger. Aussi faut-il réfléchir sur l’influence des NTIC (Nouvelles Technologies de l’Information et de la Communication) et la mondialisation sur les prises de décision et sur la mobilité desdites personnes.

De toute façon, quelques soient leurs motivations, certaines ambassades n’en reviennent pas lorsqu’elles ouvrent les dossiers des “Mamis” à qui elles ont délivré des visas avec la confiance qu’elles retourneraient. Et certaines ne sont revenues au pays natal que quelques années après leur départ avec un partenaire, à la grande surprise de l’époux resté sur place. Loin des spéculations sur les causes de leur émigration, une chose est sûre et certaine: ces personnes voyagent dans d’autres conditions que les jeunes, rencontrent d’autres difficultés sur leur chemin migratoire ainsi que dans leur pays d’accueil et nécessitent une attention et protection particulières.

Sources:

- Café Géographiques: Le marché mondial du soleil : les migrations résidentielles des personnes âgées, Le Flore, 29 mai 2007, disponible sur le lien suivant: http://www.cafe-geo.net/article.php3?id_article=1116

- UNFPA (United Nations Population Fund): State of World Population 2006. A Passage to Hope. Women and International Migration, 2006, http://www.unfpa.org/swp/2006/pdf/en_sowp06.pdf (29.3.2010).

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[1] Nous préférons ici «personnes d’un certain âge» car ceux-ci se trouvant très souvent entre l’âge de la vie professionnelle et la retraite. Pour la difficulté de la définition du troisième âge, voir un aperçu sur: http://www.cafe-geo.net/article.php3?id_article=1116)

[2] pour le cas de l’Afrique, cf. TSAGUÈ ASSOPGOUM, in: Africa & Science, 13 décembre 2011.

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