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Fanews by Faboba

Importance de notre langue maternelle

 

Bafou, la plus grande chefferie du département de la Menoua, vit, comme beaucoup d’autres groupements, l’une de ses plus graves crises, à savoir la crise culturelle. Bien sûr, l’on pourra objecter avec raison d’ailleurs, que la culture est un très vaste concept, raison pour laquelle je m’attarderai uniquement sur l’aspect langue.

 

En 1995, le Dr FOGUI Jean Pierre dans l’introduction de Plaidoyer pour notre culture définissant la langue comme :

« un "instrument" de communication : elle véhicule nécessairement une cosmogonie, une vision du monde, bref, une culture ; mieux, elle permet à cette culture de "voyager" dans le monde, de "lécher" au passage des rivages inconnus et de se nourrir des milliers de limons arrachés à ces rivages. (…) la langue est l’instrument par excellence d’épanouissement et de sublimation d’une culture. » p.7

Le jeune Bafou du XXIe siècle sait-il faire correctement usage de son patois ? Autrement dit, deux ou n jeunes Bafou peuvent-ils se soustraire des oreilles discrètes des personnes étrangères qui les entourent par l’usage de leur patois ? La situation est d’autant plus grave, car dans la majorité des cas les enfants Bafou nés en ville ne savent pas parler la langue de leurs parents.

Ce constat me semble très important dans la mesure où, à l’ère de la mondialisation et de la globalisation, la culture et singulièrement le patois est-ce qui nous restera lorsqu’on aura tout perdu au rendez-vous du donner et du recevoir. Autant le souligner tout de suite, un peuple sans culture est un peuple sans carte d’identité.

Comment donc comprendre qui nous sommes et où nous allons lorsque de plus en plus nous nous soustrayons de notre crème culturelle en adoptant au sein de nos familles comme vecteur de communication le français ou l’anglais voire l’espagnol ou l’allemand ?

Je crois sincèrement que l’usage la langue maternelle par le jeune Bafou lui est bénéfique à plus d’un titre.

Le « patois » peut cultiver et renforcer la solidarité. Sur ce plan, nos associations culturelles devraient mettre un accent sur l’apprentissage et l’adoption de la langue maternelle comme langue de communication au sein du groupe. Cet élan est mille fois plus fort lorsqu’on se retrouve à des océans de notre pays ou encore de notre Bafou natal. En réalité, on est membre de cette association parce qu’on est ressortissant Bafou, comment donc expliquer le fait qu’on ne sache pas faire usage de son « patois » ?

Le « patois » est le moyen le plus sûr de sauter pieds et poings liés dans l’antre de notre patrimoine culturel et même une forme évidente de réappropriation de celui-ci. Tenez, dans Plaidoyer pour notre culture, le Dr FOGUI Jean Pierre écrit :

« … nos parents ont une façon bien à eux d’épicer le moindre de leur propos avec des dictons qui donnent finalement à leur discours une saveur, une poésie, une "percutence", bref, une force de persuasion qu’il n’aurait pas eue autrement. » p.10

Chers parents, chers frères et sœurs, conservons jalousement ce « patois » qui nous est très précieux. Cette conservation de notre patrimoine culturel passe automatiquement par la pratique. Faisons usage de cet "outil" à domicile, partout où besoin sera et soyons en très fiers. Je suis parfois très émerveillé de constater que l’enfant Béti en ville comme en campagne n’articule ses premiers mots de la langue française/anglaise que quand il commence à fréquenter une école. Cependant, pour ce qui est de certains enfants Bafou, il suffit de dire : "Alèkoh ?" pour vous entendre rétorquer : « Je ne comprends pas le patois » ou encore « Je comprends mais je ne parle pas ». Quel scandale ! Chers parents et futurs parents, la tendre enfance est plus que jamais le moment propice pour l’individu d’acquérir une fois pour toute cet "outil" de la communication. Pour les jeunes et adolescents en difficulté, il n’est jamais trop tard, une bonne dose de volonté et le tour est joué. J’en connais qui s’y sont mis même par écrit et aujourd’hui, le patois n’a plus de secret pour eux. S’il vous arrivait de vouloir partager un secret avec votre progéniture, comment le feriez-vous au milieu d’une foule de gens qui ont pour langue de communication le français ou l’anglais ? Les questions de ce genre sont légions et je ne saurais prétendre à travers un article de journal faire une liste exhaustive.

Je crois enfin que cette contribution qui porte sur la nécessité pour nous Bafou de mettre au premier plan l’usage de notre langue maternelle, suscitera une prise de conscience effective en chacun de nous. Si à travers nos anthroponymes nous nous distinguons déjà des autres peuples, il faudra que nous le soyons davantage par la pratique effective de notre patois, car si la nouvelle forme de colonisation est culturelle ; la véritable forme de résistance à celle-ci est d’être soi-même et faire de sa culture un "bunker" capable de faire face à toute forme d’invasion et de conquête./-

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