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Pr Octave JOKUNG NGUENA, une sommité africaine cachée à Bafou

Détails: Publié le mercredi 26 juin 2013 13:04

Lors des funérailles du Commissaire JOKUNG Timothée célébrée avec faste et panache dans le quartier Menka à Bafou, zone géographique La’atsuet, nous avons fait une découverte qui nous a passionnée et qui vous intéressera sûrement : Bafou est un réservoir insoupçonné de « grosses têtes », de « têtes pleines » et surtout de « têtes bien faites ». Pour vous en convaincre, installez-vous confortablement et suivez-nous dans cet entretien :

Cher Monsieur, nous avons remarqué que vous étiez au four et au moulin tout au long des funérailles du Commissaire Jokung K. Timothée Gustave qui ont été célébrées ce jour avec une touche personnelle inédite et un chronogramme que tout le monde à Bafou pourrait copier. Qui êtes-vous ? Pourriez-vous vous présenter aux internautes de bafou.org ?

Je suis le Pr Octave JOKUNG NGUENA, né le 19 novembre 1962 à Bertoua (Est du Cameroun). Je suis originaire du quartier Menka à Bafou. Je suis le fils de feu le Commissaire Jokung K. Timothée Gustave et de feue Momo Marthe, elle-même fille de feu chef Fomenkeu NGUENA Martin de Balepouo. Je suis marié avec Jacqueline Mboui, la fille du Professeur Joseph MBOUI, et nous avons un enfant prénommé Marc-Olivier.

Professeur, pour l’information des jeunes Bafou qui souhaiteraient suivre les traces de la sommité universitaire que vous êtes, quelles sont les conditions à remplir pour accéder à l’agrégation des universités françaises ?

Le concours d’agrégation des universités françaises est un concours initié par le Ministère de l’Enseignement Supérieur et de la Recherche en France et qui a pour objectif de fournir des professeurs agrégés aux universités françaises. Il est ouvert aux français et aux étrangers titulaires d’un Doctorat Nouveau Régime ou d’un Doctorat d’Etat. Le concours se déroule pendant une année entière. Le Ministre nomme un jury composé de 6 professeurs agrégés et d’un dirigeant d’entreprise. En ce qui concerne le dernier concours, les dossiers des impétrants avaient été déposés au mois d’avril 2012 et 3 phases se sont succédées, à savoir :

- Une première leçon de présentation des travaux de recherche d’une durée de 5 minutes suivie de questions de la part du jury a été convoquée pour le mois de septembre. Le jury avait au préalable obtenu les travaux de recherche des candidats ainsi qu’une note de synthèse de leurs travaux et les rapports de deux rapporteurs comme lors de la soutenance d’une thèse. A la suite de cette première leçon qui s’est déroulée en septembre 2012, 40 candidats ont été retenus pour continuer le concours. Soit la moitié des impétrants.

- Une deuxième leçon dite générale de 30 minutes pendant laquelle chaque candidat tire au sort un sujet d’ordre général et le prépare en loge pendant 8 heures s’est déroulée fin-janvier et début-février selon l’ordre de passage des 40 candidats retenus. Durant la préparation, chaque candidat n’a accès qu’à un nombre limité d’ouvrages et d’articles et n’a pas le droit de sortir de la pièce de travail sauf pour aller aux toilettes. Les candidats entrent en loge avec leur repas. A l’issue de 8 heures de travail, le candidat présente sa leçon pendant 30 minutes. Le jury ne lui adresse aucune question. Après cette deuxième leçon 24 candidats parmi les 40 ont été invités à continuer le concours.

- Une troisième et dernière leçon dite de spécialité de 30 minutes a été convoquée fin-mars et début-avril selon l’ordre de passage tiré au sort au mois de mai 2012. Les candidats de la même option traitent le même sujet durant 8 heures en loge et à huis clos. Après 8 heures de travail, chaque candidat présente sa leçon durant 30 minutes et ensuite répond aux questions du jury. Ce n’est qu’après avoir entendu les 24 candidats restants que le jury décide des lauréats et de leur classement.

Le Jury a décidé le 10 avril 2013 de proposer au Ministre de l’Enseignement Supérieur et de la Recherche 24 lauréats. La liste validée par le Ministre a été placée sur le site officiel du ministère. J’ai été classé 1^er en Finance et 3^ème au concours général. Je suis l’unique ressortissant africain lauréat du concours d’agrégation des universités en sciences de gestion 2012-2013. Cela fait longtemps que l’Afrique n’a pas été à l’honneur dans ce concours.

Prof, pouvez-vous être plus explicite sur votre parcours personnel ?

Je suis titulaire d’un BAC série C obtenu en 1981 à Lille (France). Auparavant, j’avais été parmi les 40 récipiendaires du Brevet dit « Ndam Njoya » de 1978 et du Probatoire « Ndam Njoya » de 1980.

Après le BAC, j’ai effectué 2 années de classes préparatoires Mathématiques Supérieures et Mathématiques Spéciales, puis j’ai intégré une école d’ingénieurs. Cependant, ne m’y trouvant pas à l’aise, j’ai décidé d’aller à l’université passer une Licence en Mathématiques Pures, puis une Maîtrise en Mathématiques Appliquées. Dans la foulée, j’ai obtenu un Diplôme d’Etudes Approfondies (DEA) en Mathématiques Appliquées et un troisième cycle dans la même matière. C’est alors que j’ai rencontré le Professeur Michel Levasseur qui m’a demandé de rejoindre la Finance. Ce que j’ai fait en 1989 où je me suis inscrit au Diplôme Universitaire en gestion des risques et des instruments financiers. J’ai alors fait la connaissance du Professeur Louis Eeckhoudt, un économiste de renom, qui m’a encouragé à m’intéresser à la théorie du risque. L’année suivante, j’ai obtenu un Diplôme d’Etudes Approfondies (DEA) en Sciences de Gestion option Finance. Je me suis alors inscrit en thèse. Thèse que j’ai soutenue deux ans plus tard en janvier 1993. Jugeant mes publications scientifiques suffisantes, j’ai décidé en juillet 2001 de présenter l’Habilitation à Diriger des Recherches (HDR). Ce qui m’a permis de suivre des étudiants pendant leurs travaux de thèse.

Mon domaine de prédilection est sans conteste la théorie du risque que j’applique à différents domaines de la finance et de l’économie. J’enseigne les matières suivantes : économie de l’incertain, management des risques, gestion de portefeuille, finance d’entreprise, finance internationale, produits dérivés, économie monétaire et bancaire.

J’ai écrit et participé à l’écriture d’une douzaine d’ouvrages depuis 1998 date à laquelle je publiais mon premier livre intitulé « Microéconomie de l’incertain » chez l’éditeur Dunod à Paris.

Au niveau scientifique, j’ai publié plus d’une vingtaine d’articles majoritairement en anglais dans les revues internationales les plus difficiles d’accès à l’instar de Management Science ou du Journal of Mathematical Economics. J’ai eu l’insigne honneur d’écrire des articles avec mes deux professeurs Louis Eeckhoudt et Michel Levasseur.

J’ai démarré ma carrière d’enseignant à l’Université Catholique de Lille en 1988 où j’ai enseigné l’informatique, les probabilités et les statistiques avant de passer à l’économie en 1996. J’ai intégré l’Ecole des Hautes Etudes Commerciales du Nord (EDHEC) en septembre 1990 en tant qu’assistant et j’y ai franchi tous les échelons jusqu’à devenir Full Professor en passant par Professeur associé et Professeur de rang 1.

J’ai également occupé des fonctions administratives pendant ces dernières années. J’ai été Responsable du département économie-finance-comptabilité-contrôle de gestion de l’EDHEC pendant 5 ans, Directeur-Adjoint du LABORES, un laboratoire du Centre National de la Recherche Scientifique (CNRS) pendant 2 ans, Directeur de la Recherche du Groupe EDHEC pendant 5 ans et vice-recteur de l’Université Catholique Saint-Jérôme de Douala pendant 2 ans. Depuis un an, je préside l’Institut Universitaire des Sciences et de Management (IUSM) de Yaoundé. L’IUSM est depuis avril 2013, le seul établissement d’Enseignement Supérieur au Cameroun dirigé par un Professeur Agrégé des Universités Françaises !

Prof, pouvez-vous nous parler de vos activités extra professionnelles ?

J’ai été président de l’association DIASPORA AFRICA et de l’association ASC CAMEROUN. J’ai également été secrétaire général de l’association IDEAL. Ces associations sont toutes basées en France et possèdent des connections avec le Cameroun. Je suis aussi membre du Club 21^ème Siècle qui milite pour la reconnaissance des minorités visibles en France. Laure Pèlerin, Rama Yade et Rachida Dati étaient toutes membres de ce club.

Quelles sont vos ambitions, projets ou perceptives d’avenir ?

Le projet qui me tient à cœur est la réussite de l’Institut Universitaire des Sciences et de Management (IUSM) qui a ouvert ses portes à Yaoundé en septembre 2012 et qui compte à l’heure actuelle sept (07) partenariats, à savoir l’Université de Versailles, l’Université de Corse, l’Ecole Supérieure de Commerce de Troyes, l’Ecole de Commerce I2mSupdeco Caraïbes, la Swiss Business School, les écoles d’ingénieurs ESIGETEL et EFREI de Paris. L’IUSM délivre les diplômes de ses partenaires et permet à ses étudiants d’aller poursuivre leurs études chez lesdits partenaires. Les enseignants des institutions partenaires interviennent à l’IUSM. D’ailleurs plusieurs étudiants de Licence (3^ème année) sont dores et déjà autorisés officiellement à aller à l’ESC Troyes à la rentrée de septembre 2013.

L’idée défendue par l’IUSM est de voir les jeunes camerounais obtenir la Licence sur place avant d’aller, s’ils le souhaitent, continuer en Master chez le partenaire grâce aux nombreuses passerelles mises en place entre l’IUSM et ses 6 partenaires. L’autre volonté de l’IUSM est de faire évoluer ensemble les futurs ingénieurs (ESIGETEL ET EFREI étant les 2 premières écoles françaises en informatique, électronique et télécommunications) et les futurs managers.

Avez-vous connu des difficultés pendant votre parcours ?

Comme dans toute aventure humaine, les difficultés ont été nombreuses mais je préfère les mettre de côté et aller de l’avant. Le principe étant de ne pas renouveler les erreurs du passé et de sortir plus fort des épreuves.

Quels sont vos loisirs préférés (lecture, voyage, plat préféré .... citation préférée ...)

La lecture est un de mes passe-temps favoris. Elle concerne aussi bien les travaux techniques que les histoires de vie d’une part et d’autre part le Canard Enchaîné. L’écriture fait aussi partie de mes passions.

J’aime voyager et mon métier me permet de le faire depuis plus de deux décennies. J’ai pu donner des conférences et des enseignements aux Etats-Unis, en Argentine, au Brésil, au Canada, en Europe (Belgique, Grande Bretagne, Pologne, Autriche, …), en Australie, en Thaïlande, en Chine, à Taïwan, en Afrique (Maroc, Tunisie, Sénégal, Afrique du Sud, Mali, Côte d’Ivoire, Gabon, Cameroun, …).

Un de mes plats préféré est sans conteste le gâteau de pistache. J’aime également le maïs frais écrasé et mélangé avec des légumes.

Ma citation préférée est « Ce qui ne te tue pas te rend plus fort ». Et je suis un adepte du phénomène de résilience.

Y a-t-il d’autres Bafou qui vous ont précédé dans cette voie ?

A ma connaissance, il ne doit pas y avoir de Bafou qui soit passé par cette voie. L’essentiel des agrégés camerounais sont les lauréats de l’Agrégation CAMES qui a été instaurée par les pays africains pour fournir des enseignants à leurs universités. Concernant le concours d’agrégation des universités françaises, il faudrait plutôt parler en termes de ressortissants du continent noir. Les illustres Camerounais passés par cette voie sont lointains, il s’agit des professeurs Georges Ngango et Joseph Tchundjang Pouémi, tous deux malheureusement décédés.

Bafou.org vous remercie pour votre disponibilité à satisfaire la curiosité de ses nombreux internautes. Prof, vous êtes une valeur montante et au nom de la Jeunesse Bafou, nous vous souhaitons bon vent !

Contacts IUSM : 22 75 85 85 / 76 45 84 84